Aider les forestiers à lutter contre le réchauffement climatique

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La séquestration du carbone par la forêt et son stockage dans les produits bois est cruciale dans la lutte contre le réchauffement climatique, tandis que les conséquences de celui-ci dégradent déjà nos forêts. L’engagement des membres de FBF pour aider la forêt et le bois à jouer leur rôle est total, le défi est immense. Revue de détail des opportunités forestières.

Plantation Label bas-carbone en automne à la suite d’un incendie ; Saint-Cézaire- sur-Siagne (06). Photo : Quentin Vanneste © CNPF

Par leur capacité à absorber et stocker dans la durée d’importantes quantités de gaz carbonique, les forêts métro­politaines sont un des leviers les plus puissants dont nous disposons pour atteindre la neutralité carbone. En favorisant le développement de ravageurs, en augmentant les risques d’incendies et en perturbant le cycle de l’eau, le changement climatique porte des coups sévères à nos massifs. Le puits de carbone forestier fait-il toujours partie de notre arsenal antiréchauffement ?

C’est bien l’avis de l’Union européenne et des pouvoirs publics français. Pour que l’Union européenne devienne neutre en carbone vers 2050, la Commission européenne prévoit, en plus de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES), d’en prélever de l’atmosphère. Compte tenu des technologies disponibles et des trajectoires de baisse des émissions, il faudra probablement capter environ 300 millions de tonnes de CO2 par an, contre 263 millions de tonnes/an aujourd’hui (source : Direction générale de l’action pour le climat-DG Clima, Commission européenne).

Compensation des émissions

La France s’inscrit pleinement dans cette stratégie. Publiée en 2020, la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC-2) fixe aux professionnels de la filière forêt-bois (propriétaires forestiers, industriels du bois, constructeurs) l’objectif de séquestrer 55 millions de tonnes de dioxyde de carbone par an à l’échéance 20501.
La SNBC-2 prévoit ainsi, en 2050, un puits d’environ - 82 Mt CO2e (équivalent en émission CO2 d’un gaz à effet de serre) composé surtout du puits forestier (35 Mt CO2e), des produits bois – bois de construction, meubles, papier, carton, etc. (20 Mt CO2e), des autres terres – sols agricoles, etc.2 (voir p. 185 de la Stratégie nationale bas-carbone). En s’appuyant sur des réflexions du Club Climat Forêt-Bois et les travaux de l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE), le ministère de l’Écologie a créé, en 2018, le Label bas-carbone. Son principe est de labelliser des projets « évitant » ou « séquestrant » des émissions de GES selon que l’on se situe dans les secteurs agricoles ou forestiers. Dans le cas d’un projet de boisement sur une parcelle en déprise agricole, le Label bas-carbone mesure et certifie la différence entre la séquestration de carbone permise par le boisement par rapport à des accrus naturels. Cela donne alors lieu à l’émission de certificats carbone. Après labellisation par le ministère de l’Écologie, ils sont cédés par le forestier, à un prix contractuel3, au financeur du projet ; ces certificats permettent à ce dernier de contribuer à la compensation de ses émissions carbone.

Forêt de chênes anciens en Provence-Alpes-Côte d’Azur. Photo : Marie-Laure Gaduel - CRPF PACA © CNPF

Focus sur le Label bas-carbone

Trois des onze familles de projets labellisables concernent la forêt : le boisement, le reboisement et le balivage4, et ont été développées par le Centre national de la propriété forestière (CNPF). Elles seront prochainement complétées par des métho­dologies encadrant la sylviculture à couvert continu, l’amélioration des forêts en déficit de gestion, l’amélioration des peuplements en impasse sylvicole et la libre évolution des forêts anciennes. D’autres pourraient concerner aussi la construction avec des solutions bois alter­natives. Ce dispositif est appelé à s’étoffer. La Commission européenne prévoie d’imposer aux 27 États membres des objectifs contraignants d’absorption de CO2 à partir de 20265. Ce dispositif devrait être compatible avec le Label bas-carbone français. Il y a urgence face à l’évolution du climat : sécheresses, vagues de chaleur, incendies, attaques de scolytes et de chalarose fragilisent les arbres. Selon l’Inventaire forestier national, la ressource de bois sur pied progresse désormais moins vite que durant les décennies passées. Autre inquiétude : l’augmentation de 35 % de la mortalité des arbres depuis le milieu de la décennie passée ; un phénomène imputable au réchauffement et aux ravageurs. Près de 4,5 millions d’hectares de forêts françaises seraient d’ores et déjà menacés d’après les estimations des spécialistes. Sans compter la hausse des prélèvements qu’induisent les coupes sani­taires, « on risque de sortir d’un cercle vertueux pour entrer dans une période moins favorable sans prise en mains sérieuse du problème de l’adaptation de nos forêts au changement climatique », prédit Gwenaël Postec, expert carbone forestier. Les usages du bois se diversifiant, et l’intérêt pour celui-ci grandissant, la demande sera plus forte. La SNBC parie sur l’augmentation de la récolte pour fournir du bois en substitution de solutions fossiles ou minérales et en même temps sur l’augmentation de la séquestration carbone en forêt.
Ce n’est pas impossible, mais, pour cela, il faudra davantage de forêts adaptées au changement climatique et à ses conséquences, enjeu autour duquel est mobi­lisé l’ensemble de la filière forêt-bois.

Plantation de platane sur friche agricole à Saint-Martin-de-Crau (13). Photo : Louis Amandier - CRPF PACA © CNPF

EN SAVOIR PLUS

La filière forêt-bois joue son rôle majeur dans l’accélération de la décarbonation

Au travers de la Stratégie française pour l’énergie et le climat (SFEC), la France s’est fixé l’objectif d’atteindre la neutralité carbone en 2050.  Ce projet impose une accélération de la décarbonation du pays et une redéfinition du système énergétique national. La SFEC sera constituée de la première Loi de programmation quinquennale sur l’énergie et le climat (LPEC) déclinée par la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC), le Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC) et la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE 2024-2033), qui doivent être adoptés au 1er semestre 2024. 

Au cœur des enjeux écologiques car constitutive d’un pilier du cycle carbone, la filière forêt-bois souhaite abonder la réflexion et éclairer les autorités de sa contribution optimisée et équilibrée à la SFEC et, plus globalement, à la transition bas-carbone. Dans ce but, elle a sélectionné la société Carbone 4 pour créer plusieurs scénarios mobilisant de façon pertinente ses rôles de séquestration (puits forestier : l’augmentation des stocks de carbone dans le réservoir forestier permet de retirer du CO2 de l’atmosphère), de stockage (du fait du stockage de carbone dans la végétation et les sols des forêts, ainsi que dans les produits bois) et de substitution (énergie bois renouvelable et décarbonation des matériaux, rôle de réduction des émissions d’origine fossile grâce à l’utilisation du bois en substitution à d’autres matériaux (acier, ciment, etc.) ou énergies (charbon, pétrole, gaz, etc.) davantage consommateurs ou émetteurs de carbone fossile…). Un modèle de confrontation de l’offre et des demandes, qui ait le caractère d’un outil de filière pérenne et facilite l’appropriation du sujet par ses différents secteurs d’activité, est également en cours de création. 

Cet outil devra permettre plus largement à la filière forêt-bois de communiquer auprès de ses différents interlocuteurs sur sa stratégie et ses atouts vis-à-vis de la décarbonation de l’économie. 

Qu’est-ce que le Label bas-carbone ?

Le Label bas-carbone, lancé par le gouvernement en 2019, permet de certifier des projets de réduction d’émissions de gaz à effet de serre et de séquestration carbone dans tous les secteurs (forêt, agriculture, transport, bâtiment, déchets, etc.) et de les valoriser économiquement. > Plus d’informations

Un accompagnement financier appréciable

Le Label bas-carbone permet de financer les travaux de préparation du sol, de fourniture des plants et de mise en terre, protections à gibier, maîtrise d’œuvre et entretiens des cinq premières années pour un propriétaire forestier, à hauteur de 3 500 à 5 500 € HT en moyenne. Dans les Vosges, un propriétaire souhaitait reboiser 9 ha d’épicéa en Douglas, mélèze, chêne sessile et hêtre. Le projet séquestrera 3,7 kt de CO2 sur les 30 années à venir. Les bois scolytés ont été valorisés dans une scierie locale, le propriétaire adhère à la certification PEFC, et le sol a été préparé en potets travaillés. Le propriétaire a été financé à hauteur de 5 500 €/ha pour réaliser les travaux de reboisement.

Déposez votre projet de renouvellement de votre forêt

Propriétaires forestiers, contribuez à l’avenir de la forêt française. En déposant un projet éligible au Label bas-carbone, vous pouvez obtenir un financement vous permettant de réaliser des travaux de renouvellement de votre forêt. > Pour plus d’informations sur le Label bas-carbone

France Bois Forêt soutient le Label bas-carbone depuis plusieurs années…

… et finance en 2023 un programme porté par l’Office national des forêts (ONF), le Centre national de la propriété forestière (CNPF), l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) et l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE), visant à élaborer une nouvelle méthode pour financer avec le Label bas-carbone des enrichissements par petits placeaux d’une ou deux essences à plus forte résilience dans des régéné­rations naturelles d’essences plus sensibles au changement climatique.

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