« Utiliser le bois, c’est bon pour le climat. »
Adapter les forêts au changement climatique et exploiter la forêt n’entrent pas en contradiction. Au contraire, la récolte du bois et son usage font partie des réponses. C’est la vision argumentée que défend la professeure Meriem Fournier (Ingénieure générale des ponts, des eaux et des forêts, chercheuse dans le laboratoire Silva/Inrae, AgroParisTech, université de Lorraine).
« Si le bois n’est pas récolté et reste en forêt, en fin de vie, l’arbre meurt et se décompose en relâchant dans l’air son carbone. Ainsi, une forêt à maturité ne piège que peu de carbone. Au contraire, l’usage du bois libère de l’espace pour de jeunes arbres qui stimulent le stockage en forêt, tout en conservant le carbone sous forme solide dans le bois, pendant quelques mois pour une cagette ou des dizaines d’années dans le bâtiment », résume Meriem Fournier dans une tribune publiée, le 25 juillet 2020, sur lemonde.fr (voir encadré). Selon elle, utiliser du bois ne contribue pas au réchauffement climatique, car son usage ne déstocke pas de carbone. De même, « si l’on compare les procédés de fabrication et de mise en œuvre, ceux du bois génèrent deux fois moins de CO2 que le béton, dix fois moins que le ciment et vingt fois moins que l’acier ». Sachant qu’après une première utilisation, les bois d’œuvre peuvent être réutilisés pour des pièces plus petites, recyclés en nouveaux produits, tels que des panneaux agglomérés, et, en fin de cycle, alimenter une chaudière pour produire de l’énergie…
« Remplacer par du bois chaque fois qu’on le peut, c’est bon pour le climat car cela ne revient pas à puiser dans un stock fini, mais participe à un cycle infini. » À une condition : « Que la forêt soit gérée durablement, en réinvestissant à chaque récolte pour renouveler les arbres coupés, et pour maintenir et restaurer tous les services perturbés : stock de carbone et de bois, biodiversité, qualité du sol, valeur paysagère… Il faut, bien sûr, combattre les mauvaises pratiques sylvicoles qui menacent ces services, comme les coupes rases abusives. » Ainsi, « la forêt européenne et française doit être appréhendée pour toute la diversité de ses services. Pas uniquement comme un sanctuaire de biodiversité, de carbone et de nature, mais aussi pour produire du bois ».
La professeure revient sur son engagement pour la forêt : « L’enjeu est de reconnecter la forêt avec le bois. Avant, dans les campagnes, c’était évident, les gens voyaient les engins, il y avait la scierie du village… Maintenant, ils vivent en ville, veulent des meubles, se chauffer et ne voient les arbres que comme un décor dans lequel on va se promener pendant les vacances. Il faut arriver à reconnecter la forêt et le bois. C’est-à-dire réintroduire du bon sens des campagnes dans la société. »