La FNB et le FCBA ont testé les exosquelettes disponibles sur le marché. Une autre façon de travailler à l’attractivité des métiers de la palette en bois.
Les professionnels le déplorent : le secteur de la palette ne séduit pas assez. Le désintérêt des jeunes ou des demandeurs d’emploi est tel qu’il entrave parfois le développement des entreprises spécialisées dans la fabrication ou la réparation de palettes. Plusieurs raisons expliquent ces difficultés de recrutement : ces activités sont peu connues, l’offre de formation initiale est faible et certains postes sont réputés pénibles. Améliorer les conditions de travail ne peut que renforcer l’attractivité de ces métiers. Mais la plupart des unités de reconditionnement sont de petite taille. Investir dans une chaîne robotisée nécessite des moyens financiers importants et un volume de palettes conséquent dont elles ne disposent pas. Quelle alternative proposer ?
Manipuler 20 tonnes par jour
Les salariés et les ergonomes sont d’accord : ce sont les postes de trieurs et de réparateurs de palettes qui sont les plus pénibles. « Un trieur manipule de 400 à 800 palettes chaque jour. Il peut donc être amené à soulever, trier et déplacer jusqu’à 20 tonnes par jour », constate Léa Charron, responsable de la commission Palettes à la Fédération nationale du bois (FNB). Le réparateur, lui, est confronté à d’autres désagréments : port de charge, contraintes posturales et articulaires, déplacements, travail à la chaîne, notamment. Dans les deux cas, les salariés peuvent être atteints de troubles musculosquelettiques (TMS), sujets à la fatigue et aux troubles du sommeil.
À la demande des industriels de la FNB, le FCBA a mené une étude, financée par France Bois Forêt, pour développer l’utilisation d’exosquelettes par les trieurs et les réparateurs. Ces dispositifs, revêtus par le salarié, mettent en œuvre des systèmes mécaniques ou textiles. L’exosquelette compense en partie l’effort et apporte une assistance physique dans l’exécution de la tâche. Contrairement à une idée reçue, il ne s’agit pas d’un robot mais d’une armature. Elle assiste les mouvements du salarié par restitution de l’énergie mécanique via des systèmes élastiques ou des ressorts.
Expériences concluantes
Avec l’aide d’une ergonome, les experts du FCBA ont identifié les besoins des salariés, réalisé une analyse comparative des modèles d’exosquelettes présents sur le marché et lancé une expérimentation grandeur nature chez deux reconditionneurs de palettes. Deux modèles ont été testés : le Liftsuit et le Hapo. Le premier a été réservé aux réparateurs, le second a semblé mieux adapté aux trieurs. Menés entre novembre 2022 et février 2023, les essais de terrain se sont révélés plutôt probants.
Premier bon point : aucun usager n’a dû adapter sa façon de travailler lorsqu’il était équipé. Second point de satisfaction : « Une majorité d’usagers ont indiqué avoir ressenti moins de fatigue. En moyenne, la fatigue ressentie a diminué de 36 %, voire de 52 % si nous ne prenons en compte que les salariés qui ont ressenti une différence », détaille Léa Charron. Les douleurs se sont révélées moins fréquentes et moins intenses. Passée la journée de travail, les exosquelettes sont jugés légers, confortables et hygiéniques. Ils invitent aussi à retrouver les bonnes postures et les bons gestes. Au passif, certains salariés ont été gênés pour réaliser certains travaux ou en raison de l’inadaptation d’un matériel au gabarit du testeur. Dans certaines postures (le buste penché sur le côté), le Liftsuit peut limiter certains gestes. Le Hapo peut imposer un effort supplémentaire pour se baisser rapidement.
Les exosquelettes peinent à s’affranchir des idées reçues
Les exosquelettes sont utilisés depuis des décennies dans l’industrie et les services. Malgré cela, ils ne suscitent pas spontanément l’intérêt des chefs d’entreprise et des salariés. Selon l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), les idées reçues les concernant sont encore légion : leur utilisation nécessiterait plus d’efforts, ils seraient à l’origine d’accidents du travail, ils déconcentreraient l’usager, il faudrait être d’une taille moyenne pour les utiliser, etc. En réalité, la mise en œuvre de ces dispositifs doit être précédée d’une analyse des besoins à chaque poste de travail, d’une formation du salarié et d’une période d’essai. Ce n’est qu’à ce prix que les exosquelettes fourniront tout leur potentiel.
Quelle suite à donner à ces essais ? « Nous avons communiqué les résultats à tous les adhérents de la FNB ainsi qu’à l’ensemble de la filière. Nous devrons poursuivre cette communication auprès de la médecine du travail qui doit prévoir de cofinancer l’achat de ces matériels », conclut Léa Charron.