La production de la filière chuterait de 7 % en 2020 et de 2 % en 2021, par rapport à 2019 (scénario probable), soit une perte de valeur ajoutée de 0,5 Md€ par rapport à 2019.
Les pertes d’emplois seraient limitées à 1,7 % en 2020 et 0,6 % en 2021 (par rapport à 2019), en raison du soutien des amortisseurs sociaux/fiscaux
Dans le détail de l’industrie du travail du bois, seule la fabrication d’emballages en bois affiche une variation négative en juillet.
L’étude conjoncturelle de la Veille économique mutualisée (VEM), outil stratégique de la filière lancé en 2016, dresse un bilan de l’impact de la Covid-19 sur la filière forêt-bois au premier semestre 2020 et envisage différents scénarios. À ce jour et en dépit des impacts des deux confinements, l’année s’achève sur une bonne dynamique de croissance.
La crise sanitaire de la Covid-19 a eu un impact inédit sur l’économie française, tous les secteurs ont été touchés, et la filière forêt-bois n’échappe pas à la règle. Le premier confinement a entraîné l’arrêt de chantiers, des problèmes d’approvisionnement du fait des restrictions sur les transports et les marchés extérieurs, la rupture des chaînes de production. Soit une offre en berne. Sans oublier la baisse des salaires (chômage complet ou partiel), la contrainte sur les ménages pour l’achat de nombreux produits, ou encore l’incertitude se traduisant par une forme d’attentisme et une hausse de l’épargne.
Selon l’étude conjoncturelle sur la situation de la filière au premier semestre 2020 par rapport à 2019 – réalisée entre mi-juin et fin juillet par la Veille économique mutualisée (VEM) et restituée en septembre –, la production de la filière chuterait de 7 % en 2020 et de 2 % en 2021, par rapport à 2019 (scénario probable). En outre, l’étude révèle une hétérogénéité des situations : par exemple, + 1,8 % dans l’industrie du travail du bois en juillet 2020, contre – 7,2 dans l’industrie de fabrication de meubles, la plus sinistrée.
Un constat global positif pour résineux et feuillus
Entretemps, la deuxième vague de la pandémie est arrivée, imposant un nouveau confinement (toujours d’actualité à l’heure où nous écrivons ces lignes). Bien différent du premier, il vient redistribuer les cartes (voir interviews) : « Contrairement à ce que l’on aurait pu imaginer au premier confinement, l’amont et l’aval de la filière forêt-bois terminent l’année sur une note positive, avec une demande de produits bois très soutenue », indique Éric Toppan, coordinateur de l’Observatoire économique de France Bois Forêt et de l’outil VEM. Une tendance positive qui s’explique par la reprise de la consommation et des chantiers. « Concernant les résineux – en dehors des bois scolytés, autre crise problématique dont on ne sortira pas sans aides pour désaturer le marché et trouver une utilisation à ces bois –, les flux sont très tendus, d’où une demande forte qui se répercute sur les scieries de manière significative », précise Éric Toppan. Un constat globalement positif également pour les feuillus, avec un marché qui reste dynamique en dépit du contexte. Un bémol toutefois pour l’exportation de tonneaux en chêne qui accuse un net repli (- 10 % en un an). En cause ? La chute de la consommation de vin dans le monde, suite à la fermeture des hôtels et restaurants. À contrario, les marchés de la charpente, du parquet… se portent relativement bien.
Des incertitudes pour l’année 2021
Éric Toppan salue une filière très investie, au rendez-vous des grands enjeux de cette crise sanitaire : « Les secteurs du papier et de l’emballage pour le e-commerce ont fonctionné à plein régime pour approvisionner le territoire. Les travaux, dans le tertiaire ou chez les particuliers – amélioration, extension, voire rénovation –, ont également bien repris. Le bois, en cette fin d’année, est donc bien sur une dynamique positive. »
Quid de l’année 2021 ? « Le climat reste fragile. Tout va dépendre de l’évolution de la crise sanitaire. » Pour le moment, beaucoup d’interrogations demeurent quant au pouvoir d’achat des Français, au chômage, aux éventuelles difficultés financières des entreprises. « On sait que des pans de l’économie seront en souffrance, ce qui signifie moins d’investissements, moins de consommation, souligne Éric Toppan. Aussi le Plan de relance1 et la RE 20202 tombent-ils à point nommé. » Ces dispositifs confortent la place du bois en tant que matériau d’avenir et font de la gestion durable des forêts un enjeu national. « Ils vont insuffler une dynamique de croissance salutaire au sein de la filière », et ce des travaux sylvicoles à l’aménagement en passant par la construction. « La confiance sera le maître mot en 2021. »
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1Voir dans ce même numéro, pp. 8 et 9
2 Voir dans ce même numéro, pp. 34.
Regard de l’amont, avec Tammouz Eñaut Helou,
secrétaire général de l’UCFF (Union de la coopération forestière française)
Ce deuxième confinement a-t-il impacté votre activité ?
Il n’a rien à voir avec le premier ! La totalité de nos activités a été maintenue, qu’il s’agisse de gestion forestière ou de travaux de sylviculture et de reboisement pour le compte des propriétaires forestiers, ou encore de récolte et de vente de bois pour les usines. Nos clients – scieries, papeteries et usines de panneaux – semblent aussi travailler « normalement » : au premier confinement, seules les papeteries et scieries fabriquant des palettes pour l’agroalimentaire avaient une activité.
Comment voyez-vous l’année 2021 ?
Il y a de grandes incertitudes. Tout est soumis à l’effet domino : dès qu’un client est impacté et s’arrête, l’amont le ressent. Beaucoup d’entreprises ont pris des prêts garantis par l’État. Nous allons devoir être encore plus vigilants quant à la solvabilité de nos clients. Il faut aussi continuer à accompagner nos adhérents propriétaires forestiers dans la gestion et l’entretien de leurs forêts, dans ce contexte particulier auquel s’ajoutent les effets du changement climatique.
Nous espérons que le Plan de relance sera un coup d’accélérateur, qu’il ramène de la confiance dans le système. Nous travaillons à sa réussite. C’est la condition pour maintenir les activités de notre branche.
Pour en savoir plus :
• vem-fb.fr
• lecommercedubois.org
• lescooperativesforestieres.fr
PROGRAMME
Réf. FBF : 21OE1410
Budget FBF : 35 k€
Deux questions à Jean-Louis Camici,
président de l’association Le Commerce du bois et du Comité de développement communication de France Bois Forêt (FBF), membre du Bureau de FBF.
Quel a été l’impact de la crise sanitaire sur votre activité ?
Dans la seconde transformation et la distribution, nous n’avons pas eu de chiffre d’affaires de mi-mars à mi-mai, mais l’avons récupéré de juin à septembre. Depuis octobre, nous sommes à peu près à 5 % de plus que l’activité prévue. On note une bonne dynamique sur le secteur des produits dits de décoration, d’aménagement et de rénovation pour les particuliers, contrairement à celui de l’aménagement des magasins, hôtels, salons, privés d’activité. Cela dit, l’augmentation de la part pour le particulier compense la baisse de la partie magasins. La construction neuve dans le tertiaire est plus « calme ». Idem pour les constructions de résidences de loisirs et d’hôtels. Le neuf dans la maison individuelle se porte relativement bien, ainsi que les entrepôts logistiques, boosté par l’activité des plateformes de livraison par internet durant les confinements. Par ailleurs, nos flux logistiques subissent une désorganisation en raison des règles Covid et des salariés en quarantaine. D’où un ralentissement très net de notre productivité, donc de notre rentabilité.
Comment voyez-vous l’année 2021 ?
Les effets positifs du Plan de relance ou de la RE 2020 arriveront sur le long terme. Je suis confiant sur la création de valeur ajoutée en France, de la forêt à la seconde transformation et la distribution. Mais proposer des produits adaptés demande des investissements importants dans l’industrie et dans la recherche. Le questionnement principal est le pouvoir d’achat en 2021 et la capacité des restaurants, magasins à rouvrir. Il y aura certainement une baisse de la croissance sur 2021. Cela dit, une politique volontariste du gouvernement pourrait favoriser la construction durable en bois et limiter ainsi l’impact sur notre filière. Je ne suis pas pessimiste, juste attentif.