La communauté de communes du Val d’Amour, dans le Jura, bénéficie d’un bâtiment tout bois, tout paille. Une réponse originale des architectes Anaïs Romand et Rémi Carteron d’Atelier Zou, qui ont su convaincre les élus de la pertinence de cette association de matériaux vertueux, tant en termes de confort que d’environnement. Car, ici, tout est local : matériaux et savoir-faire.
Située dans la partie basse de la vallée de la Loue, la communauté de communes du Val d’Amour, dans le Jura, regroupe 24 villages. Suite à de nouveaux besoins et à une augmentation du nombre de salariés, les élus ont décidé de construire un bâtiment qui regroupe l’ensemble de leurs services, avec une exigence : « Dans le cahier des charges, il y avait la volonté de construire avec des matériaux locaux et des entreprises locales », se souviennent les deux architectes, Anaïs Romand et Rémi Carteron, en charge du projet. Le bois s’est rapidement imposé, les élus ayant identifié la filière forêt-bois locale comme un levier important de développement économique de la communauté de communes.
Mais imposer dans un projet de construction le bois de la forêt voisine n’est pas si simple : « S’il est moins cher ailleurs, même à plus de 200 km, il ne sera pas choisi. » D’autant que l’opération doit respecter les procédures légales, notamment le Code des marchés publics. Pour entrer dans ce cadre, ce sont les communes forestières de la communauté qui ont fourni leur propre bois de construction : « Dans ce marché, nous avons dit au charpentier qu’il allait construire avec le bois fourni par le maître d’ouvrage. »
Un bâtiment à forte identité
Pour renforcer le développement des filières locales, « nous leur avons dit que non seulement nous allions construire un bâtiment en ossature bois avec du bois local, mais qu’en plus nous avions identifié une autre ressource sur place, la paille, pour l’isolation. » Une proposition d’autant plus intéressante pour développer le tissu local qu’il n’y a pas sur ce territoire de producteur de laine de bois.
« La paille, tous les territoires en produisent. Cela permet d’impliquer les entreprises locales et la population, et de créer un bâtiment à forte identité. » Bien sûr, les architectes avaient quelques cartes en main : « Avant l’audition, nous avions analysé le tissu de sociétés présentes sur le territoire. Et nous savions que nous pourrions nous appuyer sur certaines d’entre elles. Notamment ALD Construction Bois dont c’était la première expérience en bois/paille : nous avons pu les accompagner et les faire monter en compétence. »
Une fois le projet validé, la communauté de communes a sélectionné les bois avec les communes forestières. Travail auquel l’équipe de maîtrise d’œuvre était associée : « En termes de ressource, nous avons identifié du hêtre, du chêne, des résineux… » Très vite, le hêtre est abandonné : « La réglementation sur le hêtre en structure n’autorise des montants que d’un mètre seulement. Le bureau de contrôle nous a déconseillé d’y recourir. » Ainsi, la construction sera en épicéa, sapin et Douglas. Le rayon d’approvisionnement du bois sera très limité, certaines essences provenant de la communauté de communes et d’autres, au plus loin, de Salins-les-Bains à 15 km. En outre, tout au long du processus, un travail de traçabilité a été scrupuleusement mené. Le BET structure a, en effet, demandé aux entreprises de transmettre les moyens mis en œuvre pour pouvoir contrôler, rapport à l’appui, les bois à chaque phase de la transformation : abattage, sciage, séchage, transformation et assemblage.
Une exemplarité pédagogique
Quant au bâtiment proprement dit, « sa volumétrie réinterprète de manière contemporaine les bâtis à quatre pans du village, avec des façades enduites percées de petites fenêtres et une vaste toiture en zinc portée par des poteaux obliques ».
À l’intérieur, le parti architectural a consisté à l’organiser autour d’un atrium : « Comme il s’agit d’un ERP en R + 1, il n’y a pas d’ascenseur. Les deux étages communiquent via un espace en double hauteur qui donne sur hall. » L’accueil du public est réalisé au rez-de-chaussée et les bureaux des agents sont à l’étage. « Nous avons aussi prévu des bureaux en rez-de-chaussée pour les personnes à mobilité réduite (PMR, NDLR). »
Au chapitre technique, les murs à ossature sont conçus en lamellé-collé, le faîtage est supporté par une poutre-treillis qui traverse l’atrium en diagonale, tandis que du bois massif (sapin et épicéa) a été utilisé pour les solives de plancher. Autre choix architectural, l’absence de faux-plafond : « Le solivage bois est apparent : les plafonds en dalle 600 sur 600 mm, ce n’est pas notre truc ! » Une option qui a l’avantage d’être plus économique.
À l’extérieur, deux types de finitions : bardage en Douglas et enduit à la chaux sur Nergalto avec lame d’air ventilée. En finition intérieure, des panneaux bois permettent d’intégrer certaines gaines de ventilation.
Un projet exemplaire : « Tout le monde a été volontaire dans cette démarche de valorisation des ressources locales, matériaux et savoir-faire », se félicitent les élus. Et pédagogique puisque les élève du lycée jurassien du bois de Mouchard y ont été associés : visites de chantier, conception et réalisation de la banque d’accueil.
INFORMATIONS GÉNÉRIQUES
• Thème : construction d’un bâtiment tertiaire
• Maître d’ouvrage : communauté de communes du Val d’Amour (39)
• Essences françaises : épicea, sapin, Douglas Bâtiment Bepos, label E+C- E3C1
• Accompagnement : Cofor Bourgogne-Franche-Comté
• Livraison : été 2019
• Lieu : Chamblay, Jura (39), Bourgogne-Franche-Comté
• Site internet : communesforestieres-bourgognefranchecomte.fr
INFORMATIONS TECHNIQUES
• Maître d’œuvre : Atelier Zou (39)
• Entreprises bois : scierie Michaud (39) ; structures en bois lamellé-collé : Simonin (25) ; construction maisons à ossature bois : ALD (39)
• Coût total : 1 202 k€ HT (hors terrassement et VRD)
• Coût total des lots bois : 383 k€ HT
• Volume de bois : 82 m3
• Surface : 727 m2 de surface de plancher
• Indice ART (analyse de retombées territoriales) : 83 % 153,2 t de CO2 évitées