La générosité des Français ne se limite pas au don financier : suite à l’incendie de Notre-Dame de Paris, des propriétaires forestiers s’engagent à fournir les arbres nécessaires, quand les scieries s’engagent elles-mêmes à les transformer pour restaurer sa charpente. Philippe Gourmain, président des Experts forestiers de France*, administrateur de l’Interprofession nationale France Bois Forêt, pilote avec Pierre Piveteau, ex-gérant de Piveteaubois et membre de la Fédération nationale du bois**, la coordination nationale de France Bois Notre-Dame de Paris et nous présente cette démarche.
Pourquoi une charpente en bois pour Notre-Dame de Paris ?
Philippe Gourmain – La destruction partielle de la cathédrale parisienne m’a révélé une grande méconnaissance des forêts françaises par le plus grand nombre, c’est pourquoi je me suis engagé dans ce projet. Il est nécessaire que les forestiers prennent la parole dans ce débat. Nous voulons une charpente en chêne autant pour des raisons patrimoniales qu’environnementales. Les engagements de la France relatifs aux monuments historiques et à la réduction des émissions de CO2 poussent dans le sens d’une restauration en bois.
Nos réserves sont-elles suffisantes ?
Ce chantier impressionne car Notre-Dame est un symbole, mais il ne s’agit pas d’une opération exceptionnelle en terme de quantité. Aujourd’hui, les forêts françaises comptent plus de 3,8 millions d’hectares de chênes, soit quelque 90 millions d’individus de plus de 50 cm de diamètre, soit 250 millions de mètres cubes. La restauration de la charpente de Notre-Dame requiert environ 1 200 arbres.
Nous pouvons répondre à cette demande. De nombreux propriétaires publics ou privés de toute la France ont proposé de fournir ces arbres, soulignant le lien fort entre la capitale, les régions, les communes forestières et le monde rural. Nous proposons aussi d’intégrer à la restauration des chênes mémoriels provenant des champs de bataille du 20e siècle, pour faire de l’édifice un témoin de notre histoire récente également.
En quoi serait-ce une charpente du 21e siècle ?
Le bois est le matériau écologique du 21e siècle : au 12e siècle, il était la seule ressource disponible, mais, aujourd’hui, c’est un matériau choisi et renouvelable. Il permet de stocker durablement le carbone dans les bâtiments. Enfin, ce chantier de restauration exemplaire servirait de vitrine vivante des savoir-faire français. Par sa dimension collective, nationale, historique et symbolique, ce projet fait œuvre d’art immatérielle : un projet humain profondément ancré dans son temps.
Propos recueillis par Orianne Masse pour Wood Surfer
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* Experts forestiers de France (EFF) : association à vocation syndicale des experts forestiers français – foret-bois.com/ExpertForestier
** Fédération nationale du bois (FNB) : fnbois.com