Le Groupe Coopération Forestière (GCF) développe, dans le cadre du Label bas-carbone, une méthode d’amélioration des peuplements en impasse sylvicole. Validés par le ministère de la Transition écologique, ces parcours sylvicoles pourraient générer des crédits carbone.

La France s’est fixé comme objectif d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050, et la filière a un rôle majeur à jouer par la capacité de la forêt et du bois à stocker le CO2 sur le temps long. Les effets du changement climatique sont déjà manifestes : vagues de chaleur plus fréquentes et plus intenses, sécheresses, inondations, tempêtes violentes et mégafeux, attaques des arbres par les ravageurs, etc., ont impacté les forêts et réduit le puits de carbone forestier français ces dix dernières années. D’où la nécessité de déployer des solutions techniques permettant de relancer le rôle de pompe à carbone de la forêt.
Un programme et deux méthodologies
C’est tout l’objet du programme « Amélioration de peuplements en impasse sylvicole » engagé, en 2022, par le Groupe Coopération Forestière et ses partenaires1, avec le soutien de France Bois Forêt. Ce projet cible les peuplements dont la capacité de stockage de carbone peut être nettement améliorée par une intervention. Pour cela, le GCF est engagé dans le développement de deux méthodes d’amélioration en vue de rendre éligibles ces types de plantation au Label bas-carbone (LBC) créé en 2018 par le ministère de la Transition écologique. La première méthode vise l’enrichissement, par des essences plus résilientes, de peuplements vulnérables aux effets du changement climatique, lesquels représentent une surface cumulée de 250 000 ha, selon les données de l’Inventaire forestier national (IFN).

« Développer une telle méthodologie est un travail complexe, souligne Caroline Berwick, directrice adjointe du GCF. Il faut en effet définir les critères d’éligibilité, décrire précisément les opérations couvertes par la méthode, définir le scénario de référence auquel on comparera les opérations prévues par la méthode et, enfin, les formules permettant de quantifier les plus-values ainsi obtenues en termes de carbone. »
Pour qu’un peuplement vulnérable au réchauffement soit éligible au Label bas-carbone, il faut démontrer que 20 % à 40 % des tiges présentent au moins 50 % de perte foliaire et que l’essence de référence ne supportera pas, sur sa station, les effets d’un réchauffement supérieur à + 3 °C4 relativement à l’ère préindustrielle. Remplacer une variété vulnérable par une essence plus résiliente permet d’accroître le puits de carbone forestier sur cette parcelle et, par là même, de générer les crédits d’absorption du carbone. Pour être validée par les services du ministère de la Transition écologique, qui encadrent le Label bas-carbone, la méthode doit prouver son aptitude à ne pas dégrader l’environnement en plus de sa capacité à stocker du CO2.

L’intégrité environnementale : un impératif
La seconde méthode développée par le GCF et ses partenaires porte sur l’enrichissement de peuplements à potentiel d’amélioration de stockage de carbone, de peuplements appelés communément « pauvres », qui ne remplissent pas pleinement en l’état leur rôle de captation de CO2. Cette méthode consiste en la substitution de 30 % à 70 % d’arbres à plus forte capacité de stockage de carbone et de production de bois d’œuvre. Selon l’IFN, 2 832 500 ha de peuplements matures – à la biodiversité relativement pauvre elle aussi (Indice de biodiversité potentielle5 inférieur à 21) – sont concernés : 573 200 ha de taillis ; 1 302 300 ha de mélanges futaies/taillis et 957 000 ha de futaies.
Là encore, la protection de l’environnement est un impératif. Cet enrichissement devra, comme pour la première méthode, assurer la qualité environnementale du projet. La méthode favorisera la création d’un étagement de la végétation, contribuant ainsi à un accueil floristique et faunistique diversifié et subordonné à chaque étage. En raison de son intégrité environnementale, la méthode devrait générer des réductions d’émissions anticipées de CO2 plus faibles et, par voie de conséquence, plus onéreuses. Ce surcoût a pour vocation de financer, au minimum, les peuplements résiduels pour les aménités auxquelles ils contribuent.
Dans les deux méthodes, les « dettes carbone » seront calculées en prenant en compte le volume sorti lors de la coupe d’enrichissement. Elles seront compensées en partie par les tonnes de gaz carbonique stockées dans les produits bois et les effets de substitution de matériaux dans l’économie carbone.

- Les puits de carbone sont des systèmes capables de capter et stocker du CO2 présent dans l’atmosphère.
- Un crédit carbone est un certificat relatif à la non-émission dans l’atmosphère d’une tonne de gaz à effet de serre (GES), mesurable et vérifiable, issue d’un projet d’action climatique certifié. Divers projets peuvent être mis en œuvre pour réduire, éviter ou éliminer les émissions de gaz à effet de serre et ainsi générer des crédits et compensations carbone : l’amélioration de l’utilisation des terres ; le captage du méthane ; la séquestration par la biomasse ; les énergies renouvelables ; l’efficacité énergétique industrielle.
- « Dette carbone » : expression applicable à l’ensemble des impacts générés par un produit ou équipement de la construction, tout au long de son cycle de vie en lien avec la quantité de CO2 émise lors de sa fabrication jusqu’à sa fin de vie.
- Les réductions d’émissions anticipées sont des réductions d’émissions dont la vérification et la reconnaissance ont lieu en amont ou pendant leur réalisation. Elles résultent de la prise en compte d’une trajectoire vraisemblable de réductions d’émissions nettes découlant directement du projet sur une période ultérieure, par comparaison à un scénario de référence.
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