Tribune – Jeudi 25 juin 2020
On attend beaucoup de la forêt et à raison puisqu’elle apporte des solutions aux enjeux actuels de la société. Pourtant les sons de cloches divergent à son égard. Et il y a un risque majeur actuellement de se voir dicter « la bonne manière de faire » par une bien-pensance déconnectée des réalités du terrain. Alors pour assurer l’harmonie entre la forêt, l’écologie et la société : écoutons aussi ceux qui font la forêt !
Créer un vrai dialogue et aussi nous écouter
Certains reprochent aux forestiers de terrain de ne pas être assez à l’écoute des attentes de la société, ou encore de faire preuve d’un manque de pédagogie sur leurs actions. Les forestiers n’ont pas attendu la « Marche pour le Climat » pour susciter une prise de conscience chez les citoyens. Depuis bien longtemps nous créons des passerelles entre le monde de la ruralité et celui de la ville. J’en veux pour preuve la création de la certification PEFC, à l’initiative des forestiers privés dès 1999. Ce label a pour mission de renforcer le contact avec le consommateur afin qu’il prenne conscience de l’importance de la gestion durable des forêts. Cette certification forestière intègre dans sa gouvernance la société civile à travers les ONG environnementalistes et notamment France Nature Environnement mais aussi le monde de la chasse, de l’agriculture et les associations de consommateurs.
Autres exemples qui illustrent la concertation forêt-société : les documents de gestion durable que les forestiers ont mis en place depuis les années 1960. Validés par l’Etat, ils sont rédigés dans le respect des SRGS (schémas régionaux de gestion sylvicole) eux même soumis à enquête publique. N’oublions pas également qu’actuellement se finalise, après une concertation ouverte à tous, les Plans Régionaux de la Forêt et du Bois.
Une coupe en forêt, ça choque quand on ne comprend pas ! Et pourtant ce n’est qu’une récolte qui fait partie des opérations sylvicoles essentielles à mener pour assurer la gestion d’un massif. Ce bois récolté en circuit court, fait vivre nos campagnes et que nous le retrouverons dans nos charpentes, nos maisons, nos meubles, nos livres, nos emballages ou nos chaudières…
La biodiversité au cœur de nos métiers
Là encore, les forestiers n’ont pas attendu. Si aujourd’hui la biodiversité terrestre se trouve majoritairement en forêt c’est bien parce que les sylviculteurs ont su maintenir et renouveler leurs massifs de génération en génération. Ils l’ont parfois fait à la manière de monsieur Jourdain, sans le savoir… mais ils ont aussi créé l’IBP (indice de biodiversité potentiel) qui permet de mesurer au mieux ses évolutions. Favoriser le mélange d’essences, le maintien de zones humides ou encore des îlots sénescences, constituent des réflexes inscrits dans les mœurs des forestiers. Cependant l’époque change et il faut désormais, en plus de savoir-faire, faire savoir !
Condamner et bannir les actions illégales !
Depuis des décennies, vivant au rythme et au cœur de sa forêt, le forestier est conscient de l’urgence environnementale et du rôle majeur que joue la nature pour la survie de notre planète. Les forestiers sont donc aux premières loges pour observer, et subir économiquement, l’accélération des phénomènes climatiques qui se manifeste systématiquement chez eux, en forêt. Cette inquiétude est désormais partagée par la société civile mais hélas entraine aussi l’émergence de mouvements extrémistes en recherche de « causes à défendre » menant malheureusement à de « faux combats ». D’abord sur le fond en prônant pour les forêts publiques comme privées des mesures radicales déconnectées des enjeux de gestion sur le terrain (interdiction des coupes rases, interdiction de certaines essences, volonté d’ingérence dans les choix des sylviculteurs…). Ensuite sur la méthode en faisant croire que la forêt est un bien commun – ce qui viole ostensiblement le droit de propriété pourtant inscrit dans la Constitution – et en menant des actions illégales (incendies de machines, arrachages de plants, blocages, etc).
Cette écologie punitive et violente n’est pas la solution ! Elle doit être condamnée.
C’est vrai, qu’il est plus facile de donner des leçons que d’œuvrer sur le terrain, mais les 3,5 millions de forestiers et tous ceux qui travaillent en forêt sont prêts à entretenir le dialogue pour construire ensemble un grand plan de relance de la filière forêt-bois, au service de l’intérêt général et de la société !
Antoine d’Amécourt,
Président de Fransylva
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